Innovatrice dans le domaine des spas, entrepreneuse à succès et admiratrice des merveilles de la nature… The Insider a eu le plaisir d’interviewer Susanne Kaufmann, ancienne élève de Glion dont le nom est devenu synonyme d’excellence.
The Insider (TI) : Quel est votre lien avec l’hôtellerie ?
Susanne Kaufmann (SK) : J’ai grandi dans le monde de l’hôtellerie au sein de la magnifique région du Bregenzerwald, tout à l’ouest de l’Autriche. Quand j’étais petite, nous habitions dans un hôtel, propriété de ma famille. Je jouais avec les enfants de nos clients réguliers, et j’adorais donner un coup de main en cuisine et travailler à la réception.
Je rêvais de travailler dans le secteur de l’hôtellerie et c’est pourquoi j’ai étudié à Glion. Mais notre établissement a rencontré des problèmes à ce moment-là ; ma mère venait de nous quitter, elle qui était le pilier et l’âme de l’hôtel. À la fin de mes études à Glion, je ne savais pas si j’avais envie de reprendre le flambeau. J’ai pris un peu de temps pour voyager, puis à mon retour, j’ai décidé de tenter le coup. C’est ainsi que je suis devenue la cinquième génération de ma famille à tenir l’hôtel.
TI : Comment et pourquoi avez-vous créé votre marque de cosmétiques ?
SK : L’une des plus grandes problématiques liées à l’hôtel était de trouver des façons d’attirer les clients tout au long de l’année. À l’époque, nous avions un petit spa médical. Comme j’ai toujours été intéressé par les soins et les produits utilisés, j’ai eu l’idée de développer un spa de destination afin d’attirer davantage de clients.
Nous avons commencé à travailler avec un expert en médecine traditionnelle chinoise afin de développer une gamme de traitements, notamment certaines des premières retraites détox. Gardez à l’esprit que nous étions au milieu des années 90, avant le succès actuel des secteurs de la santé et du bien-être.
Au début des années 2000, au moment de l’essor de ces secteurs, nous avons eu beaucoup de succès. En 2003, le spa était déjà devenu trop petit ; nous avons donc décidé de l’agrandir et de le rénover. C’est là que j’ai senti que nous devions proposer notre propre gamme de soins naturels sur mesure.
TI : Avez-vous toujours eu l’intention de créer votre propre marque ?
SK : En fait, c’était à la fois un besoin et un coup de chance ! À cette époque, toutes les activités de l’hôtel reposaient sur une approche locale et durable. Au niveau du spa, nous avions travaillé avec de belles marques, mais elles ne correspondaient pas vraiment à notre modèle local. Et pour être honnête, il n’y avait pas beaucoup de marques qui y correspondaient !
Le hasard a voulu que je rencontre notre producteur, qui s’occupait de nos besoins de production et de fabrication depuis le début. Cette belle installation novatrice est située dans le Bregenzerwald, à seulement 15 minutes de Bezau, où se trouve notre siège social. Il n’aurait pas pu être plus local.
TI : La problématique du « local » semble essentiel à vos yeux ?
SK : Tout à fait. J’ai grandi dans la région de Bregenzerwald, dans le monde de la santé et de la beauté, ce qui a éveillé ma passion et ma curiosité pour les ingrédients naturels et les formules puissantes. Notre philosophie consiste à utiliser les nombreuses plantes de cette région d’Autriche, le Bregenzerwald, qui procurent des bienfaits naturels en matière de bien-être. Il fallait tirer parti de ces ingrédients et les intégrer de manière moderne dans nos produits.
TI : Quelles difficultés avez-vous rencontrées en créant votre gamme de produits de soins naturels ?
SK : Je dirais que la plus grande difficulté concernait l’emballage. J’ai tenu à ce que les bouteilles soient en verre recyclable, afin d’être plus durables. On me disait que le verre était trop lourd et que ça ne convenait pas à une salle de bains, mais pour moi, ce n’était pas négociable. Mais il était impossible de commander de petites quantités de bouteilles. Alors nous en avons donc acheté 3 000, puis 5 000… Je me suis dit que si le projet n’aboutissait pas, je serais entourée de palettes de bouteilles vides pour le restant de mes jours !
TI : À l’époque, pensiez-vous que la marque rencontrerait un tel succès ?
SK : Pas du tout. Je voulais juste proposer mes propres produits pour le spa. Puis un jour, un détaillant de Munich m’a appelée pour me demander s’il pouvait acheter nos produits. Ce fut un véritable tournant ; par la suite, les ventes au détail ont continué à prendre de l’ampleur.
Au fur et à mesure de notre développement, j’ai veillé à ce que mon équipe sache que je n’accepterai aucun compromis en matière de durabilité, valeur fondamentale de notre marque. Cela ne concerne pas seulement les emballages et les ingrédients, mais aussi la production, le transport et le marketing. Il faut avoir une vue d’ensemble si l’on veut être durable.
TI : Comment définiriez-vous votre style de leadership ?
SK : J’ai pour principe de ne faire que ce que je sais faire. Un manager ne doit pas croire qu’il doit tout faire. Il faut savoir déléguer et laisser les autres faire ce qu’ils savent faire le mieux.
J’imagine que cela se reflète dans la relation que j’entretiens avec Stephanie Rist, ma directrice d’hôtel et experte en beauté. Cela fait presque 15 ans que nous travaillons ensemble et je l’ai choisie pour diriger l’hôtel précisément parce qu’elle n’est pas une hôtelière classique ; elle a énormément de connaissances dans le domaine du spa et cela a été extrêmement bénéfique pour notre entreprise. La preuve en est que nous avons été reconnus comme la « meilleure retraite de bien-être d’Autriche » lors des World Spa Awards ces trois dernières années.
Lorsque nous relancerons nos activités, le concept de l’hôtel sera beaucoup plus raffiné et ciblé. Ce ne sera plus un hôtel avec un spa, mais une véritable retraite de bien-être.
TI : Vous avez également appliqué votre philosophie en matière d’éco-responsabilité et de durabilité au remaniement complet de l’hôtel. Pouvez-vous nous parler de ce projet ?
SK : Nous allons entièrement démonter l’hôtel, puis le reconstruire selon un nouveau concept conçu par mon frère Oskar Leopold Kaufmann, qui est architecte. La notion de recyclage repose sur la conception des chambres qui, à l’origine, ont été préfabriquées et nous ont été livrées sous forme de pièces à assembler sur place. Pour ce projet de rénovation, nous allons récupérer les pièces, les rafraîchir et les réintégrer dans le nouveau bâtiment.
Lorsque nous relancerons nos activités, le concept de l’hôtel sera beaucoup plus raffiné et ciblé. Ce ne sera plus un hôtel avec un spa, mais une véritable retraite de bien-être. Le projet est incroyablement complexe, mais nous avons prévu de commencer les travaux à la fin de cette année et de rouvrir en 2024.
TI : Avez-vous présenté le concept de spa Susanne Kaufmann à d’autres hôtels ?
SK : Tout à fait. J’adore aider d’autres hôtels à développer leur concept de spa. C’est un service complet : nous ne nous contentons pas de leur fournir les produits et les plans de traitement ; nous veillons aussi à ce que notre approche holistique soit appliquée par toute l’équipe.
Mon premier spa Susanne Kaufmann hors de Bezau était à Das Stue, un hôtel boutique de Berlin. Il se trouve que le directeur général qui s’est occupé de la pré-ouverture, Jean-Paul Dantil, est également un ancien élève de Glion ! Nous ne nous sommes rendu compte de notre lien avec Glion que lorsqu’il m’a fait visiter l’hôtel en cours de construction. Nous sommes devenus de bons amis depuis ce jour.
J’aimerais vraiment avoir plus de spas, mais je ne perds jamais de vue le besoin d’être sélective. De plus, nous voulons développer des traitements spécifiques pour chaque destination. Ainsi, ce que nous proposons à São Lourenço do Barrocal, au Portugal, est très différent de ce qui est proposé au Domaine de Primard en France, par exemple.
TI : Quelles sont vos plus grandes ambitions en tant que cheffe d’entreprise et entrepreneuse ?
SK : Dans dix ans, je souhaite pouvoir contempler le chemin parcouru et constater que la marque s’est développée, qu’elle est devenue plus internationale, tout en ayant conservé sa philosophie et ses valeurs. Je veux continuer à dire que nous sommes une marque responsable, qui respecte profondément la nature et ses employés.
TI : Pour finir, pouvez-vous nous révéler quelque chose de méconnu sur Susanne Kaufmann?
SK : Eh bien, j’ai une véritable passion pour le vin. Cela remonte en fait à Glion, où j’ai rejoint le club d’œnologie des étudiants du campus, avec monsieur Jean-Claude Yorgand. Quand j’ai le temps, j’aime visiter les régions viticoles d’Europe pour en savoir plus sur leurs spécialités locales. C’est un passe-temps merveilleux, et c’est à Glion que je l’ai découvert.
- Pour en savoir plus sur les produits naturels de Susanne Kaufmann, visiter le site
- Vous pouvez visiter le site de l’hôtel Post Bezau en cliquant ici
Crédits :
Susanne et Stephanie Rist – Angela Lamprecht